En réouverture

“Requiem” de Mozart à Aix-en-Provence (© Pascal Victor artcompress)

La saison redémarre sur les chapeaux de roues, mais depuis ses accidents de mars l’Œil de l’Oreille se trouve encore sans jambes pour y courir. L’été, il est vrai, a abondé de festivals, tous de plus en plus triomphalistes et m’as-tu vu qui ne demandent qu’à se faire retransmettre. On ne peut pas dire que le cru 2019 ait apporté de bien grandes joies. D’Aix en juillet une Tosca qu’on peut oser dire monstrueuse, tant les programmateurs l’ont voulue comme telle, cassant l’histoire, multipliant l’héroïne en ses propres miroirs. En ouverture du Festival, un Requiem de Mozart où Raphaël Pichon, toujours transcendant musicalement, se laisse induire en tentation par les inserts diversement chorégraphiés. Au Festival de Salzbourg Orphée aux Enfers est du cabaret berlinois, Offenbach y est chez lui, mais nos habitudes d’écoute sont carrément bousculées. Quant au Tannhäuser bande dessinée et gribouillis de Bayreuth, effaçons-le carrément.

Karina Canellakis & Dorothea Röschmann (Arte)

Heureusement le quotidien de la musique, sa pratique régulière, se portent mieux que ces festivals de luxe où chacun se croit obligé (et capable) de tout renouveler, même Tosca. Un grand chapeau à l’Orchestre de Paris. Par Arte nous avions aussitôt un coup de bonheur. Deux dames, la chef d’orchestre blonde, élégante, attentive Karina Canellakis, et Dorothea Röschmann en soliste. Entendre ainsi s’enchaîner à un Prélude de Lohengrin scintillant de lumières les tout simples, tout ordinaires Wesendonck Lieder, quel rafraîchissement ! Et avec Röschmann, qui se fait si rare, quel réconfort que cette poésie immédiate de la ligne, ce timbre intact sur un souffle exemplaire, ces sons jamais poussés, jamais forcés. On l’avait entendue récemment retransmise de Munich dans Alceste. C’est beau, les chanteuses qui savent continuer…

John Eliot Gardiner (DR)

Evénement évidemment majeur pour la rentrée : Gardiner en tournée avec ses troupes habituelles, orchestrales et chorales, dans sa musique la plus chérie, Berlioz et Benvenuto Cellini. À Zurich autrefois sa vision s’empêtrait fatalement dans la mise en scène. Ici, semi staged, tout ‘épanouit. Berlin, Londres, Baden Baden et j’en passe, voient cet éblouissement, attrapé ici depuis la Côte-Saint-André et Versailles. Berlioz chez lui, Berlioz chez le Roi ! Et pour si bien le chanter (ce ne fut pas toujours le cas) le très extraordinaire Michael Spyres !

Michael Spyres & Sophie Burgos (DR)

Philharmonie de Paris 5 septembre & Château de Versailles 8 septembre 2019

A propos de l'auteur

André Tubeuf

André Tubeuf

Né à Smyrne en 1930, André Tubeuf collabore aux magazines Le Point et Classica-Répertoire. Il est l´auteur de romans et de nombreux ouvrages sur la musique.

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