ut pictura musica… Continuo… di Ferruccio Nuzzo – IV – Vivaldi di Zefiro – XXVI.VIII.XIII

Denis Grenier
Ecrit par Denis Grenier
Arcana / Outhere, A 365, 2013

Arcana / Outhere, A 365, 2013

Antonio Vivaldi

Concerti per fagotto

Alberto Grazzi : fagotto, Ensemble Zefiro –  

Arcana /Outhere, A 365 (66’22”)

Pour la mythologie grecque Zefiro était le dieu tendre et aimable du vent d’ouest, la brise légère qui annonce le printemps. En 1989, les hautboïstes Alfredo Bernardini et Paolo Grazzi, en compagnie du bassoniste Alberto Grazzi, solistes virtuoses, spécialisés dans le répertoire baroque et fidèles aux exécutions sur instruments originaux (Bernardini est aussi un remarquable facteur de hautbois – baroque, inutile de le préciser …) reconnu comme tel, créent l’Ensemble Zefiro, un ensemble «à géométrie variable» et polyvalent, spécialisé dans le riche répertoire du XVIIIème siècle dédié aux instruments à vent, seuls, ou comme solistes accompagnés de cordes, des riches orchestres festifs de Handel et de Telemann.
Une vingtaine de CD sont à l’actif de l’Ensemble Zefiro, des sonates virtuoses de Zelenka à l’intégrale des musiques pour vents de Mozart (Astrée) et, plus récemment, aux trois volumes de l’extraordinaire Vivaldi Edition (Naïve). Ce CD marque le début de la collaboration entre Zefiro et Arcana – la dernière créature du regretté Michel Bernstein qui, avec Astrée-Auvidis, nous avait révélé le splendide panorama de la musique baroque et classique sur instruments originaux, et de géniaux interprètes tels que Jordi Savall, Hopkinson Smith, le Quatuor Mosaïques, Rinaldo Alessandrini et Enrico Gatti.
Les Concerti pour basson, cordes et continuo de Vivaldi connus à ce jour sont au nombre de trente-neuf; un nombre exceptionnel qui n’a pas d’équivalent dans la production de l’époque en Italie – où cet instrument était ignoré comme soliste – mais aussi en France ou en Allemagne.
À seule exception près, ces concerti nous sont parvenus sous forme manuscrite et autographe; on les a retrouvés dans les archives privées du compositeur, sans aucune indication de leur destination. Pendant longtemps on a pensé qu’ils avaient été écrits pour les jeunes virtuoses de l’Ospedale della Pietà – l’orphelinat vénitien réputé pour son orchestre, son coeur et ses solistes, de toutes jeunes filles nécessiteuses – à qui Vivaldi fournissait régulièrement de la musique. Il n’y a aucun témoignage dans les archives de l’institution à propos de l’enseignement ou de l’utilisation du basson à la Pietà, même si Charles de Brosse écrivait en 1739 que l’instrument était joué dans les quatre «Ospedali» vénitiens, et que, en outre, l’utilisation du basson est manifeste dans des tableaux de l’époque qui représentent des concerts dans ces établissements, fréquentés par la bonne société vénitienne.

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Gabriele Bella

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Francesco Guardi

Si on élimine cette hypothèse suggestive, il ne nous reste qu’à penser que le destinataire était le comte bohème Vàclav Morzin,  dont Vivaldi était officiellement devenu le “maestro di musica in Italia”, et qu’il ravitaillait de moult concerti – on sait aujourd’hui avec certitude qu’il fut le dédicataire de l’Op. 8, la récolte qui inclut Le Quattro stagioni – et qui avait à son service Antonin Möser, célèbre bassoniste virtuose.
De ce corpus riche et varié Alberto Grazzi a choisi sept Concerti – quelques uns très peu connus – tous témoins de la maturité stylistique et émotionnelle de Vivaldi, qui valorise avec une légèreté  désinvolte les qualités expressives de l’instrument et son tempérament mercuriel. Grazzi est l’interprète idéal des inventions rythmiques galantes et des articulations sophistiquées, en équilibre entre  les passages virtuoses et les moments lyriques, le comique et le tragique, alternant le joyeux et le mélancolique. Et Zefiro a gardé, malgré les années, toute sa fraicheur de brise printanière …

http://www.qobuz.com/album/alberto-grazzi-ensemble-zefiro-vivaldi-concerti-per-fagotto/3760195733653

Alla prossima…

 

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Critique musical aux côtés de Giorgio Vigolo (Il Mondo) et de Piero Dallamano (Paese Sera) dès le début des années ‘60, interprète du rôle de l’apôtre dans L’Évangile selon saint Matthieu de Pier Paolo Pasolini (1964), Ferruccio Nuzzo a également été responsable avec William Weaver des programmes culturels de la Rai à destination des USA. Proche du pianiste Arturo Benedetti-Michelangeli, de la Callas et autres artistes, fréquentés à la Scala de Milan et ailleurs, il a participé à l’évolution culturelle de l’Italie en compagnie d’Elsa Morante, d’Alberto Moravia et de plusieurs autres intellectuels de la Péninsule.

Artisan avec des collègues de la création de Discoteca, premier mensuel de son pays dédié au microsillon, il a, plus récemment, été l’un des producteurs de l’émission Appasionata de la RCF (Radios Chrétiennes Francophones) consacrée aux nouveautés discographiques de musique classique.

Pour le site Internet Grey Panthers, http://www.grey-panthers.it/category/ideas/pensieri/musica/, il tient aujourd’hui la chronique hebdomadaire de récension discographique La Mia Musica, Suggerimenti d’ascolto.

Ancien photographe officiel du primat des Gaules, Ferruccio Nuzzo est surtout photographe de société ; on peut voir une partie de son œuvre sur le site http://www.flickr.com/photos/sorferru/.

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