ut pictura musica… Buxtehude

Denis Grenier
Ecrit par Denis Grenier

 

 

Dietrich Buxtehude

Membra Jesu Nostri,    BuxWV75

 

Capella Angelica

Wolfgang Katschner

 

Raum Klang, RK 2403, 2006

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Dietrich Buxtehude 1637 – 1707 , organiste de Ste Marie de Lübeck depuis 1668, compose le recueil de sept Cantates, Musiques de la Passion ou Membra Jesu nostri patientis sanctissima humissima otius cordis devitione decantata en 1680. La partition, précédée d’une page calligraphiée avec une dédicace à Gustav Düben, « homme de premier plan, très noble et très honoré ami, directeur de la musique de Sa Très Gracieuse Majesté le Roi de Suède » est notée en tablature, puis transcrite en notation traditionnelle par Düben. Les sept Cantates auraient été exécutées au sein de la liturgie, en alternance avec d’autres textes, vraisemblablement au cours de l’office du vendredi saint, et s’enchaînent selon un plan tonal organisé qui forme un cycle, signe d’éternité. Le chiffre sept, comme les sept notes de la gamme, et selon l’Harmonie du monde de Kepler, les sept planètes du système solaire établi à l’époque, mais surtout le chiffre de la création divine en sept jours, comme ici la septième Cantate chante la face du Christ mourant regardant le monde, indique que l’ensemble a été conçu comme un tout, même si les sept pièces n’ont pas été exécutées pour une même occasion la première fois, semble-t-il !

 

C’est une méditation sur les plaies du Christ, dans un mouvement de la terre au ciel, avec les sept plaies des pieds à la tête. Après la guerre de Trente Ans, la poésie baroque allemande retrouve la mystique du XIIIè siècle, ainsi que la théologie plus tardive de Maître Eckhardt. L’ensemble est en langue latine, en lien avec les textes fondateurs de l’Eglise, entre contemplation et ferveur, du bouleversement à la sérénité.

 

La modestie des effectifs vocaux et instrumentaux, cinq voix et deux dessus, une basse et un orgue, sauf dans la sixième méditation qui requiert cinq violes de gambe, donne une grande intériorité à cette musique spirituelle. La quatrième cantate, Ad latus, est introduite comme les autres par une sonate instrumentale, puis le choeur et les instruments se répondent et s’opposent, imitations, figuralismes du contrepoint, comme un concerto vocal, avec les paroles de la Bible ; ensuite ce sont trois courtes aria, dont les strophes sont séparées par des ritournelles, et un dernier concerto du choeur pour terminer.

 

Ad Latus

 

Sonata

Surge amica mea, choeur

Salve latus lavatoris, aria

Ecce tibi appropinquo, aria

Hora mortis meus flatus,aria

Surge amica mea, repetatur, choeur

 

Sur un trait aux cordes frottées d’une vivacité, d’une ténacité qui expriment une force solide, les voix chantent une pièce polyphonique de grande expressivité, aux belles lignes si touchantes, avec une sensibilité qui anime le dessin. La profondeur et la poésie du texte sont de cette manière entendues au-delà du sens des mots, comme une beauté en toute innocence, et pourtant un équilibre dans la construction par un architecte accompli, avec le mouvement du dialogue entre les voix.

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La musique est distribuée entre voix et instruments pour un véritable théâtre spirituel, aux couleurs et aux lumières vibrantes, pour une oeuvre aux lignes ouvertes, pour un monument sonore d’une plénitude éblouissante avec une sincérité poétique et une sensualité à fleur de peau.

 

                                                                          Thérèse Bécue

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Ad manus / Capella Angelica

http://www.youtube.com/watch?v=nYJ4DXJEzaQ

Ad pedes / Capella Angelica

http://www.youtube.com/watch?v=x66q-16Hes4

Ad latus   /   [par la Schola Cantorum Basiliensis] :

http://www.youtube.com/watch?v=SeSbFIgNl94

Ad latus    /    [La Venexiana & Claudio Cavina]

http://www.youtube.com/watch?v=OegzfVltCtA

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